En cas de rupture brutale d’une relation commerciale établie, la victime de la rupture a la possibilité de demander au juge du fond des dommages et intérêts du fait d’un préavis insuffisant, mais également de demander au juge des référés le maintien du contrat pendant la durée du préavis qui, selon elle, aurait du être respectée pour qu’il n’y ait pas de rupture brutale de la relation commerciale établie concernée.
C’est cette seconde possibilité que la Cour d’appel de Paris a récemment rappelé à l’occasion d’un arrêt du 26 janvier 2017 étudié ici.
Aux termes de l’article 873 du Code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut toujours, dans les limites de sa compétence y compris en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent.
Parmi les mesures conservatoires que le juge peut ordonner figure notamment le maintien du lien contractuel (Cass. com, 23 juin 2015 n°14-14.687).
Toutefois, le juge des référés peut uniquement ordonner une telle mesure afin de faire cesser un trouble manifestement illicite ou prévenir un dommage imminent.
A l’occasion de son arrêt du 26 janvier 2017, la Cour d’appel de Paris, seule compétente en appel en matière de rupture brutale de relation commerciale établie, vient précisément de rappeler que la brutalité de la rupture d’une relation commerciale en l’absence d’un préavis suffisant s’analysait en un trouble manifestement illicite.
En l’espèce, le 13 avril 2015 la société Système U avait notifié à la société Les Magasins Longoviciens la cessation de leur relation commerciale qu’elles entretenaient depuis plus de 20 ans et ce, avec effet au 31 août 2015, soit avec un préavis de 4 mois et demi.
Du fait de la durée particulièrement longue de leur relation commerciale, la société Les Magasins Longoviciens avait toutefois estimé ce préavis insuffisant et avait donc assigné la société Système U pendant la période de préavis consenti par la société Système U devant le Tribunal de commerce de Nancy afin, notamment, d’obtenir le maintien de leur relation contractuelle pour une période plus longue.
Le 26 août 2015, soit préalablement à la date de cessation prévue par la société Système U, le juge des référés du Tribunal de commerce de Nancy avait ordonné de respecter et donc d’exécuter un préavis de 18 mois préalablement à la cessation des relations commerciales entre les parties, soit jusqu’au 13 octobre 2016, et ce, sous astreinte.
La société Système U a interjeté appel de cette ordonnance devant la Cour d’appel de Paris.
A l’occasion de sa décision du 26 janvier 2017, de façon particulièrement explicite, la Cour d’appel de Paris a confirmé la décision de première instance au motif que : « la brutalité de la rupture résultant du défaut de préavis suffisant s’analysait, sans préjudice de la décision à intervenir au fond, en un trouble manifestement illicite qu’il appartenait au juge des référés de faire cesser en ordonnant, sous astreinte, la poursuite des relations commerciales litigieuses ».
Cette solution présente un avantage certain pour la victime de la rupture puisqu’elle est censée lui permettre de préparer sa reconversion tout en continuant de percevoir une rémunération versée par son cocontractant.
Catégorie : rupture brutale