L’agent commercial et les sites de vente en ligne

Rares sont aujourd’hui les secteurs d’activité qui n’ont pas fait évoluer leur façon de distribuer leurs produits et services du fait de l’utilisation exponentielle d’internet.

Dans le secteur du commerce et de la vente, de plus en plus d’entreprises proposent ainsi, en complément de leurs méthodes de vente traditionnelles, la vente de leurs produits sur des sites de vente en ligne. Et ce, qu’il s’agisse de leurs propres sites de vente en ligne ou de places de marché, sites de partenaires, etc.

Si, sauf exceptions liées à certains types de produits, aucun texte n’interdit bien évidemment le recours à la vente en ligne, il convient toutefois pour les entreprises ayant des agents commerciaux d’être particulièrement vigilantes avant de vendre sur internet. La création par le mandant d’un site de vente en ligne ou encore la vente de ses produits par le mandant sur le site d’un partenaire peut en effet revenir à concurrencer l’agent commercial et être contraire à l’intérêt commun du contrat d’agent commercial.

Obligation de respecter l’intérêt commun du contrat d’agent commercial

Le contrat d’agent commercial est un mandat. Le mandant donne ainsi à l’agent commercial, le mandataire, le pouvoir de le représenter pour l’accomplissement de certains actes en agissant en son nom et pour son compte.

Le mandat d’intérêt commun est une sous-catégorie du contrat de mandat défini par le Code civil. La caractéristique essentielle du mandat d’intérêt commun est que les deux parties ont un intérêt à « l’essor de l’entreprise par création et développement de la clientèle ».

En d’autres termes, tant le mandant que l’agent commercial a un intérêt – en pratique financier – à ce que l’agent commercial développe la clientèle du mandant.

Par ailleurs, comme pour tout contrat mais de plus fort du fait de cet intérêt commun, incombe à chaque partie une obligation de loyauté envers l’autre partie. Concrètement, chaque partie doit faire en sorte de ne pas rendre plus compliqué l’accomplissement de ses obligations par l’autre partie.

Pour le mandant, cela implique même, notamment, de mettre l’agent commercial en mesure d’exécuter son mandat normalement et, en particulier, de ne pas concurrencer son agent commercial.

Sites de vente en ligne et concurrence du mandant

Comme évoqué ci-dessus, la jurisprudence considère que le mandant ne doit pas rendre plus difficile l’accomplissement de son mandat par l’agent commercial, voire doit faciliter l’exécution de son contrat.

Mais qu’en est-il lorsque le mandant décide de vendre sur des sites de vente en ligne les produits dont il a également confié la distribution à son agent commercial ?

Un arrêt récemment rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 16 novembre 2022 a eu à se prononcer sur cette question.

En l’espèce, une société spécialisée dans la vente de vin avait confié à un agent commercial la distribution de ses produits auprès de caves, restaurants, etc.

En parallèle, la société vendait également ses produits directement auprès des clients finaux sur le site de vente en ligne « ventesprivées.com ».

Plusieurs clients suivis par l’agent commercial n’ont pas manqué de faire part à ce dernier de leur mécontentement, leurs propres clients préférant se fournir en définitive sur le site de ventes privées plutôt qu’auprès d’eux, les produits y étant vendus à des tarifs plus avantageux.

En définitive, n’arrivant plus à revendre les produits du mandant à leurs propres clients, plusieurs clients de l’agent commercial ont ainsi préféré arrêter de se fournir auprès de ce dernier. L’agent commercial a alors considéré qu’il y avait une concurrence déloyale de son mandant.

De son côté, le mandant considérait qu’il était libre de ses actions, l’agent commercial ne bénéficiant d’aucune exclusivité.

Aux termes de sa décision, confirmée sur ce point par le Cour de cassation, la Cour d’appel de Paris a considéré que l’activité parallèle du mandant était de nature à porter atteinte aux conditions d’exercice de son mandat par l’agent commercial. Que cela l’avait notamment mis en difficulté par rapport aux clients qu’il suivait à ses clients et donc, qu’un tel comportement était déloyal.

Le mandant a en conséquence été condamné à verser une indemnité de fin de contrat à son agent commercial qui avait pris acte de la rupture de son contrat aux torts de son mandant.

En définitive, le recours à la vente en ligne peut donc être source de réelles difficultés pour l’agent commercial pour exécuter son contrat normalement. Et, ipso facto, de tensions dans les relations entre mandant et agent commercial.

Tel sera en particulier le cas lorsque le contrat d’agent commercial aura été conclu avant que le mandant n’ait recours à la vente en ligne.

L’arrêt ci-dessus montre toutefois que le fait que vente en ligne et contrat d’agent commercial aient coexisté dès le départ ne garantit pas dans tous les cas une coexistence seraine de ces deux canaux de distribution pour autant.

Accompagnant nos clients lors de la rédaction et la signature de leur contrat d’agent commercial, nous conseillons également nos clients en cas de difficultés dans l’exécution de leur contrat.

Nous nous tenons donc à votre disposition pour toutes questions que vous pourriez avoir en la matière.

AUMANS AVOCATS (anciennement FOUSSAT AVOCATS & DEROULEZ AVOCATS)
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