En cas de liquidation judiciaire de l’agent immobilier, les fonds détenus pour le compte d’un client par l’agent immobilier n’ont pas à être déclarés au passif de l’agent immobilier mais auprès de l’organisme qui s’est porté garant de leur remboursement.
L’article L 622-24 du Code de commerce prévoit que lorsqu’une entreprise fait l’objet d’une procédure de sauvegarde, redressement judiciaire ou liquidation judiciaire, ses créanciers doivent déclarer au mandataire judiciaire leurs créances antérieures au jugement d’ouverture de la procédure collective, faute de quoi ces créanciers perdront le droit d’en demander le paiement (et a fortiori de l’obtenir, à supposer ici encore que l’actif disponible soit suffisant pour les désintéresser).
Toutefois, dans le cas des agents immobiliers, ceux-ci sont conduits à détenir pour le compte de leurs clients des sommes transitant (de façon tout à fait régulière) sur leur compte en qualité de simple mandataire, tels que, par exemple, des loyers encaissés pour le compte de leurs clients leur ayant confié la gestion d’un bien.
A l’occasion d’une affaire jugée le 15 octobre 2015, concernant la liquidation judiciaire de l’agent immobilier, la Cour d’appel de Paris a précisément eu à juger du fait de savoir si ces sommes devaient donner lieu ou non à déclaration de créance conformément à l’article L 622-4 du Code de commerce.
En l’espèce, une société civile immobilière propriétaire d’un immeuble donné en location avait confié la gestion de celui-ci à un agent immobilier qui a été placé par la suite en liquidation judiciaire.
L’agent immobilier détenant des loyers pour le compte de la sci, se posait donc la question de savoir si celle-ci devait ou non déclarer une créance au passif de l’agent immobilier à hauteur de ces loyers devant lui revenir in fine.
Aux termes de son arrêt du 15 octobre 2015, la Cour d’appel de Paris a répondu par la négative à cette question en se fondant sur la loi Hoguet du 2 janvier 1970. En effet, aux termes de la loi Hoguet et de son décret, lorsqu’un mandant est confronté à une non représentation de fonds, il doit déclarer sa créance entre les mains du garant financier qui vérifie alors si la créance est certaine, liquide et exigible. Le garant devient alors le seul interlocuteur du mandant dans l’hypothèse d’une non représentation des fonds.
La Cour en déduit donc que ces « fonds mandants » n’entrent pas dans le passif de l’agent immobilier, les deux procédures (à savoir celle prévue par l’article L 622-2 du Code de commerce relative à la déclaration de créance et celle prévue par la loi Hoguet) étant exclusives l’une de l’autre.
Et la Cour d’ajouter à juste titre : la solution contraire reviendrait à doublement indemniser les mandants et à gonfler artificiellement le passif de l’agent immobilier ou, à l’inverse, à ce que les mandants soient lésés par une répartition au marc le franc de l’actif de l’agent immobilier disponible pour désintéresser ses créanciers.
En définitive, par cette décision, la Cour d’appel se conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation en ce qui concerne en particulier la créance du mandant d’un agent immobilier (v. Cass. Com. 15 février 2011, n°10-10.056) et plus généralement les créances correspondant aux sommes transitant sur le compte d’une entreprise intervenant en qualité de simple mandataire (v. Cass. Com. 30 juin 2004, n°03-17.330).
CABINET AUMANS, Société d’Avocats, PARIS / BRUXELLES / MARSEILLE [email protected] tags: agent immobilier